Robert « Bob » Vennum peut être considéré comme le fondateur et le leader des BellRays (on écrit aussi « Bellrays »), où il joue de la guitare et de la basse et produit les albums – il a aussi joué dans plusieurs petites formations garage, comme les Black Widows. C'est à la fac qu'il rencontre au tout début des années 90 Lisa Kekaula, une Afro-Américaine (née le 31 juillet 1967) qui a du sang hawaiien. Dotée d’un caractère bien trempé et d'une voix hors du commun, qui évoque souvent Tina Turner, Betty Davis ou Aretha Franklin, elle chante un peu, à ses heures perdues. Ouverte à tout, elle apprend grâce à Bob à apprécier des groupes « blancs » comme les Stooges, le MC5, les Who ou Led Zeppelin.
Ils fondent alors leur propre groupe, The BellRays, influencé par tous ces grands noms mais aussi par la musique noire. Au début, ils ne jouent qu'en duo et surtout du rhythm'n'blues, mais leur copain Tony Bramel (alias Tony Fate) les rejoint à la basse et l'Amérasien Ray Chin s'installe à la batterie et ainsi, ils ne tardent pas à virer au rock. En 1992, un album autoproduit, In the Light of the Sun, est leur première parution, d’abord uniquement en cassette (il sera réédité des années plus tard en CD) : Bob y joue la guitare et ils ont à leurs côtés un trompettiste, un saxophoniste et même un claviériste, Jim Kerwin.
Premiers pas
C’est en fait l'échange de fonctions entre Bob Vennum et Tony Fate qui marque pour les BellRays un vrai coup d’accélérateur, leur son se durcissant considérablement, d’autant que Tony, très bon guitariste, participe de plus en plus aux compositions. Entre temps, Bob Vennum et Lisa Kekaula n’ont pas tardé à se marier et ont une fille : pour faire vivre leur ménage, ils enchaînent au sortir de la fac les boulots, Bob travaillant dans des salles de concert comme éclairagiste et Lisa dans une librairie.
Avec leurs économies, ils financent l’enregistrement (effectué sur un vieux magnéto quatre-pistes) d’un premier vrai album, Let It Blast, qui sort en 1998 : cette fois, ils n’y sont que quatre et Tony joue la guitare sur tous les morceaux. Ce disque est suivi deux ans plus tard par Grand Fury, qui a lui aussi été enregistré sur du matériel de fortune. Les BellRays commencent alors à se faire un nom aux Etats-Unis en jouant en première partie de Nashville Pussy et dans plusieurs festivals garage, dont le South By Southwest d'Austin, où les réactions sont délirantes.
Couronnes de lauriers
En 2003, l’Anglais Alan McGhee les signe sur son label Poptones et sélectionne des chansons de leurs deux albums déjà existants pour en faire une compilation destinée au marché européen : Meet the BellRays. Cet album permet au groupe d’être remarqué par la presse d’outre-Atlantique, qui lui attribue généralement de bonnes critiques, et ses concerts, toujours donnés pied au plancher, déclenchent vite le téléphone arabe.
C’est en France, après un passage remarqué dans la capitale (au Nouveau Casino), qu’on leur réserve systématiquement le meilleur accueil, le groupe ne tardant pas à écumer toutes les petites salles, aussi bien à Paris qu’en province. Leur énergie, ainsi que le charisme et la personnalité hors du commun de Lisa Kekaula font forte impression, un journal plutôt élitiste comme Les Inrockuptibles n’hésitant pas à les qualifier de « plus grand groupe du monde ».
Pourtant, à compter du départ de Ray Chin, le poste de batteur s’apparente à un siège éjectable et deux remplaçants (Todd Westover et Eric Allgood) sont successivement épuisés avant que le groupe ne déniche Craig Waters. Au même moment, une compilation de raretés et de faces B, Raw Collection, sortie chez Uppercut Records, remet un peu d’ordre dans leur catalogue, beaucoup de leurs chansons étant sorties dans le passé chez différents petits labels, sur des disques souvent pressés en vinyle et à quelques exemplaires.
Tous azimuts
En 2003, à partir de l’album The Red, White & Black, leur réputation grandit à l'échelle internationale (même si les ventes ne sont pas toujours au rendez-vous) et des offres extérieures ne tardent pas à leur parvenir : lié depuis longtemps à Wayne Kramer, le groupe lui « prête » ainsi entre deux concerts sa chanteuse Lisa, éternelle workaholic, pour la tournée de reformation du MC5 (sous le nom « DKT/MC5 »), où elle chante à chaque concert un bon tiers des chansons et évoque irrésistiblement un Rob Tyner réincarné en (maîtresse) femme.
Devenue sans effort le membre le plus populaire des BellRays, elle prête aussi sa voix aux groupes Crystal Method et Now Time Delegation et sa participation au projet britannique Basement Jaxx (« Good Luck », sur l'album Kish Kash) lui vaut même un Grammy Award. En 2005, les BellRays, toujours très demandés en concert, publient un DVD, Live @ the Barfly, filmé à Londres et dans lequel beaucoup voient leur meilleur enregistrement, leur réputation de groupe de scène éclipsant largement celle de leurs albums studio : issus de la vieille école, ils n'hésitent pas à tester sur les planches leurs nouvelles compositions, ne s'autorisant alors qu'une seule (mais formidable) reprise, celle de « Highway to Hell » d'AC/DC.
Francophiles
En 2006, les BellRays changent de maison de disques (passant sur Cheap Lullaby) et enregistrent le plus funky Have a Little Faith, dont certaines chansons comportent des cuivres – on y remarque au passage une surprenante version des « Cornichons » de Nino Ferrer, et en français ! Leur succès dans l’Hexagone ne diminuant pas, ils songent même un temps à s’y établir. Tout irait donc pour le mieux si un coup de théâtre ne survenait en 2007, quand Tony Fate quitte le groupe après quinze ans de bons et loyaux services, des raisons de santé étant invoquées, de même que la fatigue.
Ne se laissant pas démonter, Kekaula et Vennum assurent comme à leurs débuts quelques dates en duo et en acoustique sous le nom Bob & Lisa, Bob revenant pour l’occasion à la guitare, son instrument d’origine. Décidant de rester pour de bon à la six-cordes, il recrute un bassiste nommé Justin Andres et c’est sous cette nouvelle forme que les BellRays enregistrent pour un label français (Vicious Circle, de Toulouse) l'album Hard, Sweet and Sticky (2008) et continuent de tourner, en vrais stakhnovistes de la scène, ce groupe unique étant loin d’avoir dit son dernier mot.