Les morceaux de Saults sont de ceux qui font l’effet d’une fontaine de jouvence, prouvant qu’il est possible d’unir dans un même élan songwriting percutant, fougue électrique, élégance mélodique, harmonies vocales et souplesse instrumentale indéniable. De refrains aux harmonies brûlantes à des bombements groovy, de vagues sonores insouciantes à de jouissifs remous, le groupe s’invite en toute félinité dans notre époque.
De la pop, dopée par une énergie rock, riche de la galopade éclairée de refrains rayonnants. Celle des frères Antoine et Greg, respectivement vingt-sept et vingt-quatre ans et la musique comme premier langage. Saults, anagramme légèrement détournée de leur nom au civil.
Les garçons grandissent à Villeneuve-sur-Lot au sein d’une famille de mélomanes : une grand-mère chanteuse d’opéra, un grand-père saxophoniste, un père pianiste et avec lequel ils s’exercent à des boeufs endiablés autour des classiques anglo-saxons et américains. Dès l’âge de deux ans, plutôt que d’absorber indéfiniment des dessins animés, Antoine se poste devant les vidéos des concerts de Prince, McCartney, Eric Clapton. Mime ses héros, prend son premier cours de guitare à six ans. Greg le rejoint trois ans plus tard à la batterie. Tous deux volontaires
et en demande constante pour se perfectionner.
Après le passage quasi-classique du groupe monté au lycée, Saults signe son acte de naissance en 2014. Déjà parmi les forces vives et fidèles jusqu’à aujourd’hui, Axel Costets à la basse, qu’ils considèrent comme le troisième membre de la famille. Déjà une formation aux gueules et au charisme criants, une présence folle, un sens du gimmick et cette guitare si essentielle dans le son. Néophytes et connaisseurs s’étaient d’emblée mis d’accord sur le fait que la formation avait ce supplément d’âme. Animé presque essentiellement par des influences anglo-saxonnes (la touche française, -M- et Zaoui notamment, viendra s’y greffer plus loin dans le temps) et dans la foulée d’une première partie de Julian Perretta à Agen face à dix mille personnes, Saults part pourtant s’installer à Londres à la fin 2017.
Un saut dans le vide où personne ne les attend. Malgré une première année à l’acclimatation compliquée (chambre de 10m2 à deux sans chauffage, comprise), novices en ce territoire inconnu mais sacrément motivés, les frangins n’hésitent pas à se retrousser les manches. Prêts à en découdre dans les bars, clubs et caves désireux de les accueillir. Ils s’accrochent, enregistrent le titre Kelly Ride dans les mythiques studios d’Abbey Road, se produisent au Love Supreme Jazz Festival. Tandis que plusieurs de leurs morceaux sont diffusés par les radios de la BBC, ils reçoivent même les dithyrambes de Pete Townshend, le guitariste des Who : « Ils jouent dans la même division qu’un groupe comme 1975 ».
En 2023, Saults publie VOST FR, un EP produit par Jack Wilson (Fickle Friends) et première pièce à l’édifice vers une douce émancipation en expression francophone ouvrant la porte à d’autres désirs. Y figure notamment Only place to hide, chanson anglophone écrite en mémoire d’un ami défunt. Et qui va faire décoller le groupe à la verticale grâce à un écho considérable en France (420K streams organiques dont plus de 80% d’écoutes actives, 200K YouTube et une invitation live chez Manu sur NRJ dans la plus grosse matinale radio de France). Solo final de guitare digne de Prince signé par Antoine, voix cristalline de Greg comparée par beaucoup à celle de Michael Jackson, le morceau s’élève en majesté et pète tous les plafonds. Car contrairement à d’autres fratries au tempérament batailleur, tout ici sent la complicité, le respect mutuel, la fusion à la fois sereine et intense. Une complémentarité dont l’approche musicale porte les stigmates.
Désormais à califourchon entre l’Angleterre et la France, ceux qui prêtent également leur physique avantageux pour des marques sont bel et bien décidés à poursuivre leur marche en avant, ancrant ainsi leur terrain de jeu dans leur langue natale.
En éclaireur d’un album à venir, A la mode, single funk-disco éclatant, solaire et réalisé par Jérémy Chapron.
Saults ne fantasme pas le passé mais le célèbre avec une modernité imparable.