Née le 19 juillet 1937 à Bonham (Texas), Karen J. Cariker grandit dans l'Oklahoma avant de s'installer à New York vers 1960. Dès son arrivée, elle investit la scène des clubs du Greenwich Village où elle se fait connaître par un répertoire d'airs traditionnels et de reprises.
Pionnière du « folk boom », elle côtoie Bob Dylan et Fred Neil - dont elle interprète plusieurs morceaux - sans parvenir à retenir l'attention des labels dans leur prospection d'artistes. Ce manque d'opportunité est aussi dû à sa grande frayeur des studios qu'elle évite durant plusieurs années, préférant tourner dans les états du Nord. Au milieu des années soixante, Karen Dalton fuit New York pour s'installer avec son mari Richard Tucker dans une cabane du Colorado, sans eau courante ni adresse postale.
En 1969, Karen Dalton revient à New York à l'invitation de son ami Fred Neil pour assister à l'une de ses séances. Le rendez-vous fixé avec le producteur Nik Venet s'avère un moyen détourné pour la convaincre d'enregistrer. Le résultat aboutit à la sortie du foudroyant It's So Hard To Tell Who's Going To Love You The Best sur le label Capitol. Le disque paru bien après la vague folk apparaît comme désuet en pleine célébration hippie, et tombe rapidement dans l'oubli.
Néanmoins, l'entourage de Karen Dalton insiste pour qu'elle réalise un deuxième effort concrétisé dans les studios Bearsville à Woodstock par Harvey Brooks, bassiste de l'Electric Flag et producteur de Quicksilver Messenger Service. Édité en 1971, In My Own Time ne recueille pas davantage de succès et avorte la carrière de la chanteuse dont les rares exégètes s'accordent sur la parenté vocale avec Billie Holiday.
Non reconnue de son vivant malgré l'approbation de ses pairs (The Band lui dédie « Katie's Been Gone »), Karen Dalton sombre dans l'alcool et les drogues jusqu'à sa mort du sida le 19 mars 1993. Quatre ans plus tard, c'est à la faveur de la réédition de ses deux albums que Karen Dalton connaît une gloire posthume. Le culte grandissant dans les médias spécialisés est entretenu par la parution de titres inédits sur Cotton Eyed Joe (un live de 1962 paru en 2007) ou Green Rocky Road (2008) et 1966 (2012), datant de sa période de retrait dans le Colorado. Dans le premier volume de ses mémoires, Chronicles, Bob Dylan lui rend un hommage appuyé (« ma chanteuse préférée du Village »). À l'instar de Nick Drake, Karen Dalton est aujourd'hui considérée comme l'une des voix les plus importantes de son temps.