Nouveau piano solo "La mélancolie de Satie"
« ÉLOGE DE LA LENTEUR »
Il aura fallu 10 ans à David Grumel pour donner une suite à son lumineux premier album « Beaurivage » (naïve). Ce qui pourrait sembler une éternité, s’impose ici simplement comme le bon moment, le temps juste. Sous cette apparente lenteur, existe une évidence rythmique pour cet artisan de la musique qui cultive la patience, capte les micro-mouvements et révèle les détails.
A l'image des galets qu’il laisse sur son chemin dans « Little stones », David Grumel est un semeur de chansons et les 9 titres envoutants « d'Utopia » sont là pour en attester. Chaque composition mène sur un chemin en pente douce, quelque part entre pop et musique de film.
Qu’il joue du piano, son instrument de prédilection, du santoor, de la guitare ou d’autres instruments bizarres (theremin, cymbalum, omnichord...) Il prolonge avec justesse le long-métrage en versicolore entamé avec « Beaurivage ». La sensibilité est toujours là, à fleur de peau, mais la sobriété et l’authenticité ont encore franchi un cap pour atteindre l’épure. A l’image de sa voix simple et posée (« Western soul »), David Grumel possède l’élégance de la retenue.
Volontiers contemplatif, David n’en est pas moins un travailleur acharné et perfectionniste. Les dix années qui séparent ses deux albums ont été tout sauf improductives : collaborations artistiques et productions studio (Davis, Neeskens, The pirouettes...), b.o. et musiques de pub (Renault scenic, Deutsche bahn, Visa premier...), le temps aussi de faire des enfants et de se laisser chahuter par la vie.
Côté références, David distille ça et là des indices : Ennio Morricone hante « Lee manoir », l'ombre de François de Roubaix traverse « Bari-Roubaix » et son premier extrait « A starry night » (sortie le 4.09.15) évoque un souvenir d’enfance. On sent pourtant bien que l’essentiel de son inspiration est sans doute moins dans l'émotion des paysages, des livres, des films ou des rencontres qui ont pu jalonner son parcours. Pour l’anecdote c’est d’un simple battement de cœur qu’est né « Nino’s theme ». Et si des artistes comme Neeskens, Lauren Lopez (caspian pool) et Cascadeur offrent leur participation au projet, on comprend vite que leur présence est due autant à leur qualité d’âme et à l’amitié qu’ils entretiennent avec l’artiste qu’à leur grand talent.
Pas surprenant dès lors que David ait choisi « utopia » comme titre pour ce nouvel opus. En écoutant « The good, the evil », ou encore « L'azur » qui clôt le disque on se prend à rêver que le monde idéal imaginé par thomas more est là, tout proche, sur les rives du lac d’Annecy où David sculpte patiemment son cours d’eau dans la roche, apportant sa respiration dans un monde fou.