A Lyon en 1997, DJ Pee et DJ Stani, biberonnés au hip-hop, au reggae et au dub, sont très inspirés par le crédo punk du Do It Yourself , ce qui les pousse à trouver leur propre voie et à expérimenter hors des formats. Surtout (à l'instar d'autres formations de la même famille, comme leurs voisins lyonnais de High Tone), le duo souhaite miser sur une musique et des prestations live, afin de se différencier de la scène anglaise d'abstract hip-hop portée par des ingénieurs du son et producteurs. S'ils s'en sont certes inspirés, ils ne veulent pas en être de simples copies. Les deux bootleggers et remixers s'entourent donc de deux musiciens, le batteur Psychostick et le trompettiste N'Zeng, gages de leur touche française instrumentale, qui leur permet de puiser dans le répertoire rock et acid jazz.
Dès ses premiers maxis, le groupe trouve une autre marque de fabrique : l'utilisation de voix samplées, extraites de films ou oeuvres sonores archivées par ses collectionneurs passionnés. Quant au nom du groupe, il est choisi juste après la sortie du film-documentaire Microcosmos : le peuple de l'herbe . Un choix que les membres du groupe aiment justifier par leur « amour de la nature » mais aussi pour indiquer sans ambage leur position sur le discours pro-légalisation, débattu plus ouvertement à l'époque. Les premières compositions du Peuple de l'Herbe, « Herbman Spank » et « PH Theme » , font fureur notamment via Radio Nova qui plébiscite le groupe sur ses ondes et le fait figurer sur sa compilation Future Dub Vol.1 en 2000.
Le groupe crée son propre label, Supadope Records, sur lequel sort son premier album regroupant les maxis déjà sortis, Triplezéro. Le groove introductif de « P.H. Theme » expose la maestria des DJs pour compiler, des extraits sonores irrésistibles aussi explicites que la pochette de l'album, sur laquelle un chien tient dans sa gueule une feuille de cannabis. La même année les Lyonnais interviennent sur la B.O. de Baise-moi , le film de Virginie Despentes. Même s'ils ne se sentent pas extrêmement proche de l'oeuvre de Despentes, ils avouent comprendre sa démarche et attirent une nouvelle fois l'attention des médias. Médias, dont l'insistance à n'évoquer en priorité que le sujet du cannabis et de la censure dont le groupe pourrait être victime, convainquent le Peuple de l'Herbe à ressortir une nouvelle version de Triplezéro , en 2001, comportant trois remixes inédits et une pochette zoomant sur le chien (et non la feuille...).
Mais les travaux de studios sont avant tout prétextes à la réalisation de concerts phénoménaux, qui leur valent une victoire de la musique en 2002, dans la catégorie Découverte Scène. PH Test Two , leur second album, sort en 2002 et confirme l'appétit sans borne du quatuor. Il offre un mélange toujours aussi efficace de tous les courants de musiques actuelles tendance trip-hop, jungle et electro, pour un résultat plus nerveux, à la griffe déjà bien reconnaissable. Un album « de la maturité », comme le veut la formule consacrée, qui remplit parfaitement toutes les clauses du contrat passé entre « Le Peuple » et son public, dont la première est de faire danser. Le tube « Mr Nice » marque l'arrivée du MC anglais JC 001, qui devient un collaborateur régulier du groupe français. Quant au chanteur ragga Uk Apache, il intervient sur le titre « No Escape » pour une fusion des plus énergiques.
Devenu incontournable, Le Peuple de l'Herbe s'engage dans des tournées de plus grandes envergures qui les emmènent en Allemagne, en Belgique, en Hollande et en Espagne, ainsi que dans les grands festivals européens. Le très attendu premier disque live du groupe, Sold Out (2004), est réalisé au cours de la tournée PH Test Tour. Puis, « Cube » , enregistré dans leur studio de Lyon, la Supadope factory, sort en 2005. JC 001 est toujours présent, mais alors que le groupe réussit une nouvelle fois un grand écart entre les styles, le tout avec un humour communicatif sur les titres « Kesskonf » et « St Cloud » (« si vous êtes contents, amenez-nous vos amis ! »), l'incursion dans le hip-hop est plus nette, notamment grâce à la participation de Puppetmastaz ( « El Passo » ). L'album marque le départ de DJ Stani comblé, d'abord sur scène puis en studio, par l'arrivée de Spagg.
Alors qu'en 2006 Le Peuple de l'Herbe prend position en faveur du droit au téléchargement de la musique sur internet, il publie l'année suivante Radio Blood Money. Ce quatrième album studio, qualifié à sa sortie sur leur site officiel comme « la bande son de la dernière chance », aborde des thèmes plus sombres et montre un groupe plus engagé politiquement. Ce disque-concept, adapté d'une oeuvre de science-fiction de Philippe K. Dick, dans lequel les survivants d'une guerre nucléaire émettent une dernière émission de radio par satellite, ne fait plus dans la légèreté.
Le désormais quintette (avec la voix de JC 001) conscient de son impact, a réalisé que les problèmes d'aujourd'hui sont plus graves que lors de la création du groupe, mais souhaite cependant que sa musique ne reste qu'un outil de « prise de conscience ». Enfin, après avoir patiemment compilé des années d'images de leurs très nombreuses scènes, Le Peuple de l'Herbe publie un CD-DVD intitulé tout simplement Live . Sorti le 15 septembre 2008, il regroupe un concert, un documentaire parcouru d'interviews et des courts-métrages.
Avec Tilt en 2009, Le Peuple de L'Herbe confirme sa bonne santé et son attachement à un style souvent imité et rarement égalé. L'album suivant A Matter of Time paru début 2012 confirme la propension du groupe à mélanger les genres rap-electro-rock dans un grand bain de samples et beat boxes. Toujours égal à lui-même malgré une volonté de renouvellement qui se traduit par la place nouvellement occupée par la guitare, Le Peuple de l'Herbe sort Next Level en septembre 2014. Son successeur, baptisé Stay Tuned, survient trois ans plus tard, il bénéficie de l'arrivée d'Oddatteee, chanteur d'High Tone.