Le 25 septembre 1927 naît à Weybridge dans le Surrey, Colin Rex Davis, troisième enfant et cadet de Reginald George et Lilian Davis. Fils de mélomanes, Colin Davis grandit dans un environnement propice à la pratique musicale. C'est ainsi que, pour son premier concert, il a l'occasion de voir le chef d'orchestre anglais Malcolm Sargent et d'écouter le chanteur soprano d'origine danoise Lauritz Melchior dans l'opéra Siegfried de Richard Wagner.
Colin Davis clarinettiste
Un autre élément déclencheur de sa décisiion de devenir musicien est, à l'adolescence, l'écoute répétée de la Symphonie n°8 de Beethoven. Après avoir fréquenté l'internat du Christ's Hospital, vieille institution du Sussex dotée d'un conservatoire de musique, Colin Davis est admis à l'audition préparatoire du Royal College of Music de Londres où il étudie la clarinette dans la classe de Frederick Thurston, aux côtés du virtuose de l'instrument, Gervase de Peyer, futur enseignant du prestigieux collège. Son niveau insuffisant au piano l'empêche d'accéder à la classe de direction d'orchestre qu'il souhaite intégrer.
Néanmoins, Colin Davis va avoir l'opportunité de conduire son premier ensemble lors de son service militaire quand il est nommé à la direction de l'orchestre de la garde royale installé à Winsor. Pendant les permanences du weekend, il retourne à Londres pour assister à des concerts et s'imprégner des gestes de grands chefs nommés Bruno Walter ou Thomas Beecham. En 1949, une fois libéré des obligations militaires, Colin Davis s'établit en tant que chef d'orchestre indépendant, à disposition de toute institution. Avec d'autres étudiants du Royal College of Music, il fonde le Kalmar Orchestra qu'il dirige lui-même et dont la réputation lui permet d'intégrer le Chelsea Opera Group pour une production de Don Giovanni.
Années d'apprentissage
En 1952 démarre une collaboration avec le Ballet russe de Monte-Carlo rebaptisé Original Ballet Russe, rapidement interrompue par des problèmes internes et la dissolution de la compagnie. Entre deux engagements, il continue à jouer de la clarinette et effectue quelques missions de préparateur et de lecteur au cercle musical de l'Université de Cambridge et à l'université d'été de Bryanston sur une représentation de L'Enfance du Christ de Berlioz.
La carrière de Colin Davis prend un nouveau tournant en 1957 quand, après trois tentatives, il est admis à la direction du BBC Scottish Ochestra où il met au programme des oeuvres modernes et peu usitées du répertoire. En 1959, il remplace au pied-levé Otto Klemperer, souffrant, pour une représentation de Don Giovanni au Royal Festival Hall. Le chef d'orchestre est acclamé. En septembre, après un concert avec The London Mozart Players, le journaliste Thomas Heyworth fait son éloge dans The Observer en le citant comme le meilleur dirigeant depuis Sir Thomas Beecham. Colin Davis, nouveau directeur d'orchestre très en vue, prépare La Flûte enchantée du festival de Glyndebourne avec Beecham, qu'il remplace lors du concert. Dans un article de The Time, il est alors bombardé « maître du style Mozart ».
Du Sadler's Well à Covent Garden
En 1960, Colin Davis participe à son premier « Prom's » avec un programme comprenant Mozart, Britten, Schumann et Berlioz avant d'être nommé directeur du Sadler's Well Opera, succédant à Alexander Gibson. Une fonction qu'il occupe jusqu'en 1965. Il y introduit notamment Meurtre dans la cathédrale de Pizzetti, L'Opéra de quat' sous de Kurt Weill, Oedipe roi de Stravinsky et Iolanthe de Gilbert & Sullivan ainsi que Janacek. Après cette première expérience de longue durée, celui qui est considéré comme l'un des plus grands voire le plus grand chef d'orchestre anglais du moment préside à la destinée du BBC Symphony Orchestra où il entre en concurrence avec Sir Malcolm Sargent, directeur musical des « Prom's ».
C'est en 1970 que Colin Davis se voit offrir l'un des deux postes qu'il convoitait, celui de directeur musical de l'opéra royal de Covent Garden, succédant à Georg Solti (l'autre poste étant le London Symphony Orchestra). Au même moment, il reçoit une invitation du Boston Symphony Orchestra, qu'il décline pour se consacrer à l'institution britannique. En décembre, le chef dirige la création de l'opéra de Keith Tippett The Knot Garden.
Il connaît ensuite des moments difficiles lors des productions de Nabucco ou du Ring de Wagner puis finit par se faire accepter avec ses programmes Berlioz (Les Troyens, Benvenuto Cellini), Verdi (Falstaff, Rigoletto, Aida), Mozart, Britten et Stravinsky (Peter Grimes, The Rake's Progress). En quinze années d'activité à la tête du Royal Opera soit jusqu'en 1987, il mène plus de trente projets différents dont les ambitieux Lulu et Wozzeck d'Alban Berg, The Ice Break de Keith Tippett, Le Nain et Une tragédie florentine d'Alexander Zemlinsky. Dans le même temps, Colin Davis conduit le BBC Symphony Orchestra de 1971 à 1975 et le Boston Symphony Orchestra de 1972 à 1984, avec une parenthèse au Festival de Bayreuth en 1977 pour un Tannhaüser bien reçu. Outre un passage à la direction du Metropolitan Opera de New York en 1969, Colin Davis dirige également l'Opéra national de Vienne en 1986 et l'Opéra de Bavière en 1994.
Le vieux rêve de Colin Davis
Entre 1983 et 1993, le chef d'orchestre anglais succède à Rafael Kubelik à la tête de l'Orchestre symphonique de la Radiodiffusion bavaroise où il s'illustre dans les répertoires de Bruckner et de Mahler. Durant cette période, il fait une brève apparition à la Staatskapelle de Dresde en 1990. En 1995, son rêve devient réalité quand il accède à la direction permanente du London Symphony Orchestra après y avoir été invité en 1959 et lors d'une tournée en 1964 puis en 1975 et 1983. La fin de ce mandat en 2006 clôt la plus longue collaboration du LSO qui le nomme président honoraire comme jadis Karl Böhm et Leonard Bernstein.
Entre 1998 et 2003, Colin Davis fut également invité par le New York Philharmonic. Le 21 juin 2009, un concert exceptionnel est donné en son honneur au Barbican Center où le LSO joue la Symphonie n°40 de Mozart et le Concerto pour piano n°2 de Brahms avec Nelson Freire. Après un fameux cycle Sibelius en 1992 et Les Troyens l'année suivante,The Rose Lake de Tippett en 1995, il introduit les symphonies du compositeur danois Carl Nielsen.
Legs artistique
Sous contrat avec la marque Philips dans les années soixante puis RCA dans les années 1990, Colin Davis a donné des versions de référence des opéras Le Messie (1966), Les Troyens (1970) et des douze Symphonies londoniennes de Haydn en 1982 avec le Concertgebouw Orchestra. Ses cycles de symphonies de Brahms (1989-1993), Sibelius avec le LSO, Beethoven (1995) et Schubert (1996) font date. Depuis 1999, il a réalisé également de nombreux enregistrements du label LSO Live.
Sir Colin Davis, qui tient la chaire de direction d'orchestre à l'Académie royale de musique à Londres depuis 1985, a été fait Commandeur de l'Empire britannique en 1965 et anobli en 1980. Commandeur des Arts et des Lettres en 1987, il reçoit successivement la Légion d'honneur (1993) et, rare honneur, la Queen's Medal for Music (2009). Son fils Joseph Wolfe a aussi opté pour une carrière de chef d'orchestre. Àgé de 85 ans, Sir Colin Davis décède le dimanche 14 avril 2013 après une courte maladie.
