Il ne faut pas toujours chercher un sens caché au nom d'un artiste. Gérard Lenorman est né le 9 février 1945 à Bénouville en Basse-Normandie, de Madeleine Lenormand et de père inconnu. Puis, il déménage en Auvergne où il découvre sa passion pour la musique : dès l'adolescence, il fait des tournées avec de petits orchestres du côté de Clermont-Ferrand. En 1963, âgé de dix-huit ans, un grave accident de voiture l'immobilise un an et l'amène à explorer la voie artistique. Sa première interprète est de choix puisqu'il s'agit de la brûlante Brigitte Bardot ! En 1968, il lui écrit avec Franck Gérald deux titres dont « La Fille de paille ».
L'univers de Gérard Lenorman est particulièrement marqué par l'enfance et la recherche des origines. En 1968, il enregistre un premier EP quatre titres avec Boris Bergman chez Disc'AZ, qui contient « Le Vagabond », une chanson qu'il a écrite à douze ans ! Il sort une série d'autres Super 45-tours quatre titres plus ou moins marquants (« Rêve », « Nocturne (Et puis...) » et « Si les murs pouvaient parler »), un répertoire avec lequel il part en tournée en 1969 auprès de Sylvie Vartan. Quand en 1970, Julien Clerc abandonne la fameuse comédie musicale Hair, Lenorman voit le soleil entrer et le remplace au pied et aux cheveux levés au théâtre de la Porte Saint-Martin !Tintin à la police et Picsou aux financesLa carrière de Gérard Lenorman prend véritablement son envol en 1971 avec un titre pour le moins singulier, écrit par Guy Skornik, « Il » ou l'histoire d'un « enfant sauvage ». A l'instar de Michel Delpech, Lenorman enchaîne durant les années 1970 une série de succès emprunts de mélancolie, « Les matins d'hiver » (1972), « Si tu ne me laisses pas tomber » (1973), et « Quelque chose et moi » (1974). En 1975, Lenorman accomplit le rêve de tout artiste, écrire un hymne fédérateur et populaire. C'est le cas de « La Ballade des gens heureux », face B du 45-tours « Le Funambule », et consacrée l'une des plus belles chansons françaises après « La Mer » et « Les Feuilles mortes » ! Le texte idéaliste de Pierre Delanoë, semble avoir banni durant trois minutes et 18 secondes tous les maux de la planète.
Après un Olympia en 1975, le chanteur confirme son succès chez CBS avec trois titres phares, « Michèle », « Gentil dauphin triste » et « Voici les clés ». Mais Lenorman, l'ami des enfants et des animaux, est-il aussi naïf qu'on voudrait le croire ? En 1980, à l'aube du sacre de François Mitterrand, il sort « Si j'étais président », une chanson qui supporte une deuxième lecture plus sarcastique. Quelques décennies plus tard, comment ne pas sourire face à certaines phrases ? « Rien ne serait comme avant, si j'étais président » ou « Si t'étais président de la République / Pour nous, tes p'tits copains, ça s'rait super pratique / On pourrait rigoler et chahuter sans risques »...Je vais te croquer LenormanAbonné aux chansons romantiques et candides, Lenorman surprend avec un titre sombre et introspectif. « Warum mein Vater » (en français : « Pourquoi mon père »), sorti en 1981, revient sur ses racines où il écrit « Je me suis fait un nom que mes enfants porteront ». En effet, le chanteur apprend à l'âge adulte que son père qu'il n'a jamais connu, était un soldat allemand. Sa mère avait préféré lui cacher la vérité sur les circonstances de sa venue au monde. Une histoire sur laquelle il revient en 2007 dans un livre autobiographique Je suis né à vingt ans.
En 1982, on ne peut pas non plus oublier une scène culte du film Les Sous-doués en vacances de Claude Zidi, où Gérard Lenorman joue son propre rôle. Le personnage de Daniel Auteuil le menace au téléphone en lui disant : « Je vais te croquer Lenorman. Je vais te faire bouffer tous tes disques. Même tes Disques d'or ». Mais à partir des années 1980, les disques d'or sont plus rares... Certes, le chanteur se produit au Palais des Congrès en 1982, mais son style est de moins en moins en phase avec la musique plébiscitée.
Paradoxalement, à la même époque, il est précurseur lorsqu'il produit deux groupes débutants, Indochine et Imagination ! Puis, en 1987, il continue de chanter avec nostalgie « La Saison des pluies » et « Le Bleu des regrets », adaptation en français de « Take my Breath Away » de Berlin et B.O du film Top Gun.Chanteur de charmeWarum ? Pourquoi Gérard Lenorman accepte-t-il en 1988 de se rendre à Dublin pour représenter la France au 33ème concours de l'Eurovision ? Son titre « Chanteur de charme » récolte 64 points et termine dixième, alors que les concurrentes cette année-là ont pour nom Céline Dion et Lara Fabian : il fait donc un score honorable. Dans les années 1990, le succès est de retour sans être flamboyant avec le 45-tours « Montfort l'Amaury » (1990) et l'album Il y a (1993). L'année suivante, le chanteur remonte sur scène au Casino de Paris. En 1998, il sort Le Monde de Gérard Lenorman, une compilation avec des titres en version étrangère.
A l'automne 2000, le chanteur publie un album studio La Raison de l'autre, avec entre autres Nicolas Peyrac qu'il avait aidé au début de sa carrière. En 2001, Il remonte à l'Olympia mais reste discret dans les medias. En 2007, il sort une triple compilation Je Vous Reparlerai d'Amour et continue sans relâche la scène avec une tournée jusqu'à la fin de l'année 2008. Lenorman est aussi l'un des rares chanteurs français à avoir donné des concerts en Europe, en Amérique du Sud et au Japon. Quoi de plus universel que la « Ballade des gens heureux » ?
En 2011, la nouvelle génération de la chanson rend hommage à Gérard Lenorman en reprenant avec lui ses plus grands succès. L'album Duos de Mes Chansons paru en octobre réunit l'Australienne Tina Arena (« Voici les clés »), Zaz (« La Ballade des gens heureux »), Florent Pagny, Patrick Fiori, Maurane, Grégoire, Stanislas et Joyce Jonathan.