Ichon. Pour de vrai.
Doté d’un talent d’écriture et d’interprétation indéniable ainsi que d’un sens de l’esthétique étonnant, Ichon n’a cessé de fasciner et de dérouter depuis son premier projet. Cyclique, sorti en 2014, semait les graines d’une plante énigmatique aujourd’hui en pleine éclosion. Inclassable pour certains, il n’y a pourtant jamais eu de doute dans le coeur d’Ichon, et ce depuis le début : il n’y a que la première place qui compte. Il est « né dans le 9-3 en 1990 ». Si ce n’est ni une fierté, ni une revendication, c’est néanmoins un fait permettant de dresser la toile de fond des premières années de l’artiste. Il passe son enfance à Montreuil auprès de ses frères et de ses parents restaurateurs. La personnalité qu’il développe en grandissant fait que l’école l’ennui très vite. Il préfère charmer les filles de sa classe, et s’évertue à être le champion dans tous les jeux que réserve la cour de récréation. À cette époque, il est hypnotisé par les hits de variété qui rythment le Walkman de sa mère et par les clips qui passent en boucle sur les chaines musicales. Ces artistes qui trustent le top des charts le font fantasmer. Il pense alors vouloir être comme les stars qui éblouissent son écran. Ce n’est pas ce qu’il deviendra.
Quand un copain le met au défi de rapper, il relève évidemment le challenge. Il se met à écrire des chansons, comme un accessoire en plus à la panoplie des éléments qui font de lui un ado pas comme les autres. Il cherche constamment à faire sa place, et son charisme lui permet de tirer son épingle du jeu dans les différents milieux qu’il est amené à côtoyer. Toutefois, c’est la musique qui l’amènera à réellement définir qui il est. Son pote Loveni le pousse à prendre son talent au sérieux et plus tard, leur rencontre avec Myth Syzer donnera une dimension tangible aux aspirations d’Ichon. Ils forment ensemble alors Bon Gamin et au même moment, le jeune montreuillois met toute son âme dans son premier projet. Or la singularité de sa musique en déconcerte plus d’un. Il fait selon lui tout comme il faut mais ne réussi pourtant pas à rentrer dans le moule. Alors qu’il s’était efforcer à faire poésie de toute la violence qui l’habite, il n’a d’autre choix que de la libérer à l’état brut. Il écrit alors « Pulsion » qui bénéficie de toute l’attention dont Cyclique avait manqué. Vexé, il plonge dans la satire et la provocation. Il intitulera ce renouveau artistique #FDP. Sorti en 2016, l’EP est frontal, corrosif et profondément introspectif. Cette mise à nue lui permet de jouer le jeu de la surenchère de virilité qui caractérise le milieu du rap auquel il est rattaché. Il poursuit sa quête de reconnaissance en 2018 avec Il Suffit De Le Faire, où il arbore le costume du Ichon que l’industrie voudrait qu’il soit. Cependant, cette course est vaine ... Le bleu, la vitesse, tout ceci est sans fin. Toutes ces postures n’ont aucune valeur face à la paix et à l’honnêteté qui jaillissent lorsque Ichon décide enfin de réellement faire sa musique Pour De Vrai.
Jean Benoît « Jxy Breez » Ndoki