Née le 1er juillet 1971 à Portsmouth (Virginie), Melissa Arnette Elliott connaît une enfance particulièrement troublée, en raison d’un père violent. Très vite, la musique devient pour elle un refuge et se prend d'admiration pour Diana Ross, Michael et Janet Jackson. Cette obsession pour la musique devient encore plus prégnante lorsqu’à l’âge de 14 ans, elle quitte le foyer avec sa mère, afin de s’éloigner de la violence paternelle ; ses conditions de vie sont alors très dures et Melissa rêve d’échapper à ce quotidien en devenant une superstar. Ses poupées forment alors son seul public, et elle commence à écrire ses premiers textes (généralement sur les murs de sa chambre !).
Sista, sista
Ce n’est pourtant qu’en 1990 qu’elle forme avec trois amies son premier véritable groupe, Fay Z, qui se renomme rapidement Sista. Les quatre jeunes filles enregistrent plusieurs maquettes sous la houlette de leur ami Timothy Mosley (qui ne s’appelle pas encore Timbaland), et décident de présenter quelques chansons au musicien R&B DeVante Swing, à l’issue d’un concert de son groupe Jodeci. Cette audace s’avère payante : en 1991, DeVante Swing signe Sista sur son propre label, Swing Mob, une filiale d’Elektra Records. Si l’album enregistré par Sista, 4 All the Sistas Around da World, ne sortira finalement jamais, l’expérience n’en reste pas moins enrichissante et formatrice pour Missy Elliott, qui se met à écrire des textes et à rapper pour plusieurs artistes du label, à commencer par Jodeci.
A l’issue de l’aventure Swing Mob, fin 1995, Sista n’existe plus ; mais Missy Elliott, elle, décide de poursuivre sa route en compagnie de Timbaland. Le duo propose alors ses services de « songwriting » et de production à d’autres artistes et les demandes ne tardent pas à affluer. L’une d’entre elles concerne une jeune chanteuse de R&B, Aaliyah, dont le deuxième album, One in a Million, presque entièrement écrit et produit par Missy Elliott et Timbaland, va se vendre à plus de onze millions d’exemplaires dans le monde, ouvrant ainsi au duo la porte du succès international.
De l'ombre à la lumière
Profitant de ce courant ascendant, Missy Elliott signe un contrat avec Elektra en tant qu’artiste solo, et crée immédiatement son propre label au sein de la maison-mère : The Goldmind. Après quelques apparitions sur des titres d’autres artistes (New Edition, MC Lyte), où elle rode ses talents vocaux, la chanteuse sort enfin son premier album solo, Supa Dupa Fly en juillet 1997. Porté par l’excellent single « The Rain » et rassemblant quelques invités d’exception (Busta Rhymes, Lil’ Kim, Da Brat…), l’album est un succès, et la critique salue déjà la forte personnalité qui se dégage du disque. Il est vrai que l’alliance de la production futuriste de Timbaland, qui lorgne allègrement vers l’electro, et de la verve enlevée d’Elliott, toujours à mi-chemin entre hip-hop et R&B, forme un mélange inédit et potentiellement explosif.
Ce potentiel, Missy Elliott continue à l’exploiter sur son second album, Da Real World (juin 1999), qui lui permet d’élargir encore son public, notamment en Europe – le remix du single « All N My Grill », en duo avec MC Solaar, étant un parfait sésame pour ce nouveau marché. Mais c’est surtout son troisième album, Miss E… So Addictive (mai 2001), qui l’installe de manière définitive au panthéon des personnalités les plus influentes du hip-hop international. « One Minute Man » et surtout l’incroyable single « Get Ur Freak On », consolident l’image d’extraterrestre de la chanteuse (image renforcée par des clips souvent futuristes et inquiétants), tout en devenant d’énormes tubes.
Miss E(ntreprise)
Dès l’année suivante, Missy Elliott sort son quatrième album solo, Under Construction (novembre 2002) – un disque qui, contrairement à ce que laisse supposer son titre, est parfaitement abouti (« En construction »). Porté par un nouveau tube (« Work It », une charge plutôt drôle et bien vue contre le machisme du milieu hip-hop) et accueillant une liste d’invités toujours plus impressionnante (Method Man, Jay-Z, Beyoncé, TLC, 50 Cent…), l’album atteint une fois de plus des sommets en termes de vente (4,5 millions d’exemplaires). Et le rythme ne faiblit pas : poursuivant dans la même veine, This Is Not a Test ! sort en novembre 2003 – mais ne rencontre pas cette fois le même succès critique et commercial que son prédécesseur, malgré le fait qu’il se situe toujours bien au-dessus de l’ordinaire de la production hip-hop.
En dépit de ce léger revers, il est évident que Missy Elliott, au-delà même de ses talents artistiques, est désormais devenue une figure populaire incontournable. En tant que telle, elle apparaît partout : dans des publicités pour Gap, Adidas ou Sprite ; au prestigieux show d’ouverture des MTV Video Music Awards 2003 (aux côtés de Madonna et de Britney Spears) ; à la tête d’une ligne de vêtements de sport (Respect M.E., en partenariat avec Adidas) ; en tant que productrice et animatrice d’une émission de télé-réalité (The Road to Stardom with Missy Elliott, en 2005) ; ou encore en figure de proue d’une association caritative (Break The Cycle, destinée à aider les enfants victimes de violences domestiques).
La cuisine de Missy
Cette abondante activité n’empêche pas Missy Elliott de revenir à la musique en juillet 2005, avec un nouvel album intitulé The Cookbook. Suite aux chiffres de vente relativement décevants de This Is Not a Test !, la chanteuse a cette fois veillé à se renouveler en faisant appel à une multitude de producteurs et non plus au seul Timbaland… ce qui s’avère être au final une fausse bonne idée, l’album souffrant clairement d’un manque de cohérence et d’une certaine banalité – un comble pour une artiste comme Missy Elliott .
En septembre 2005, sur le tournage de son nouveau clip, la chanteuse rompt son tendon d’Achille, ce qui la force à suspendre temporairement ses activités. La période de silence qui suit cet accident est partiellement comblée par la sortie de Respect M.E. (septembre 2006), un « best of » qui parvient à s’écouler à un demi-million d’exemplaires, en dépit d’une promotion restreinte et des évidents contrecoups de la crise du disque – preuve supplémentaire que la popularité de la chanteuse reste toujours au plus haut.
En 2008, elle prépare un film sur l’histoire de sa vie ; un nouvel album intitulé Block Party est annoncé pour le mois de septembre. Après avoir ouvert la voie à toute une génération d’artistes (The Neptunes en tête) qui, en mariant sonorités inhabituelles et formats pop au fort potentiel commercial, ont collectivement contribué à façonner la musique des années 2000, Missy Elliott devrait avoir à cœur de montrer, avec ce nouvel opus, qu’elle mérite toujours son surnom de « reine du hip-hop ». Nul doute qu’elle y parviendra – une fois de plus.