Attention départ, titre validé par elle-même de son vivant, avait des allures de mise en garde. Comme la possibilité ouverte d’y lire aussi bien une avancée vers un futur à vivre qu’une fuite en avant imminente. Détachée vis-à-vis de sa propre mort, Dani confiait fréquemment qu’elle « partirait tout d’un coup ». Même son épitaphe, elle l’avait prévue, conservant secrètement ce texte ("J’avais raison") offert il y a cinq ans par Robi, digne, vibrant et qui ne sanglote jamais.
Dès les premières notes, on la retrouve telle qu’on la connaît, telle qu’on l’aime. Interprète en majuscule, indépassable mélange de sauvagerie, de sensualité non policée, de tendresse diffuse. Chant à la fois si désinvolte et si incarné, en apparence indifférente aux drames. Et cette voix évidemment irrésistible, sur le velours rauque, légèrement goguenarde, d’une retenue savamment dosée pour fouetter l’épiderme. Pop, rock, chanson. Inutile d’étiqueter cette femme-là. Elle transcende tout. C’est un disque irrigué par une mélancolie lumineuse, dans l’énergie du live qu’elle partageait avec Emilie Marsh, dopé par des chœurs mélodiques et accroche-cœur. Les lignes limpides tracées par les guitares, élément central, mènent au firmament. Les chansons annoncent en même temps un décollage vers les étoiles et un appétit mordant de vivre, glissent sur une sensation de dépersonnalisation, prennent leur distance avec les sentiments ou encerclent la solitude d’impertinence.