Reconnu comme l'un des plus grands compositeurs contemporains, Arvo Pärt est né le 11 septembre 1935 à Paide, près de Tallinn, en Estonie. Élève de l'école secondaire de musique de Tallinn en 1954, il est appelé l'année suivante sous les drapeaux et joue du hautbois et de la caisse claire dans la fanfare militaire. En 1957, Arvo Pärt reprend ses études musicales au conservatoire de Talinn où il suit l'enseignement du compositeur et pédagogue Heino Eller jusqu'en 1963, l'année de son diplôme en composition. Parallèlement, le musicien exerce le métier d'ingénieur du son à la radio d'état estonienne et compose des musiques de films pour la télévision.
Sous la censure
Arvo Pärt se fait connaître en 1963 lorsqu'une de ses premières compositions Notre jardin, datée de 1959, est primée au Concours des Jeunes Compositeurs d'URSS. Il devient du jour au lendemain l'un des compositeurs les plus en vue du pays. Cette situation est de courte durée car depuis, le musicien néo-classique amateur de Bartok, Prokofiev et Chostakovitch est passé au dodécaphonisme de Schoenberg puis au sérialisme qu'il considère comme une impasse dans sa créativité. Pärt s'attire peu à peu les foudres du régime soviétique et subit la censure de ses oeuvres. Cette opposition au pouvoir en place ne va pas aller en s'améliorant quand il se plonge dans l'étude de la musique chorale médiévale de Josquin des Prés, Guillaume de Machaut et Johannes Ockeghem et les premières oeuvres polyphoniques de la renaissance.
L'oeuvre « tintinnabuli »
Attiré par la musique sacrée, ce qui est considéré comme inacceptable par le pouvoir en place, Arvo Pärt entre dans une nouvelle phase créative qui le conduit à la composition du Credo qui fait scandale lors de sa création en 1968 et marque son indépendance vis-à-vis des autorités culturelles de l'URSS. Ce qui est aujourd'hui considéré comme l'une de ses oeuvres majeures, la Symphonie n°3 créée en 1972 par Neeme Järvi, dresse un rideau entre les musiciens qui le soutiennent et le corps de l'État. Les recherches stylistiques d'Arvo Pärt vont le mener à un style personnel qu'il définit comme « tintinnabuli » en raison des cloches, instrument récurrent de ses partitions.
À travers son minimalisme étudié, la pièce Für Alina (1976) symbolise la rupture avec ses oeuvres précédentes. De ce même esprit jaillissent les créations qui vont figurer au centre de son oeuvre : le canon pour orchestre à cordes et cloche Cantus In Memoriam Benjamin Britten, le quintette pour cordes ou pour vents Fratres (révisé en 1983 et sujet à de multiples variations) et la fresque Tabula Rasa sont tous composés dans l'intervalle de quelques mois en 1977 et suivis de la pièce Spiegel Im Spiegel utilisée dans de nombreux films de Sorrentino, Godard, Gus Van Zant ou Mike Nichols.
Exil à l'Ouest
En 1980, Arvo Pärt fait ses valises avec femme et enfants pour s'installer en Autriche et jouir d'une reconnaissance plus favorable. Le compositeur installé à Vienne adopte la nationalité autrichienne avant de repartir pour Berlin et de signer avec le label allemand ECM. Pärt ne retournera dans son pays natal qu'à l'aube de l'an 2000 après l'indépendance des pays baltes. Les époques viennoise et berlinoise sont marquées par une série d'oeuvres dont font partie Passio alias St. John Passion (1982), le Te Deum de 1984 et la Litanie.
Sa notoriété grandissante lui amène un nouveau public parfois inattendu comme les amateurs de musique new age ou minimaliste, friands de ses miniatures dépouillées. Ses oeuvres sont désormais jouées dans le monde entier et connaissent de multiples interprétations enregistrées. En 2005, après son retour en Estonie, le festival de Rheingau représenté par Bernard Fink l'honore d'une programmation généreuse où ses oeuvres les plus connues sont jouées par l'Orchestre symphonique de la radio bavaroise ou The Hilliard Ensemble. L'heure de la consécration a sonné pour Arvo Pärt dont les productions inondent le marché du disque.
Reconnaissance mondiale
En 2006, sa composition Für Lennart est jouée lors des funérailles du président estonien Lennart Meri. La même année, il rend hommage à la journaliste d'investigation Anna Politskovskaya, mystérieusement assassinée après sa couverture du conflit tchétchène. En 2008, la radio nationale estonienne le commandite au festival de Dublin tandis que la Société de musique contemporaine de Louth (Irlande) passe commande du chant The Deers Cry basé sur la Prière de Saint-Patrick. Toujours en 2008 est éditée sa première symphonie en 37 ans, la Symphonie n°4 dite Los Angeles, dédiée à Mikhail Khodorkovsky, dont la première se tient au Walt Disney Concert Hall de L.A. le 10 janvier 2009 (l'oeuvre est nominée aux Grammy Awards). Fin 2011, le pape Benoît XVI le nomme membre du Conseil pontifical pour la culture. L'année suivant paraît la pièce Adam's Lament.
À la tête d'une oeuvre considérable et importante englobant 183 partitions, Arvo Pärt est l'un des plus grands compositeurs de son temps. Le Centre international Arvo Pärt de Laulasmaa destiné à l'édification d'un musée, fonds d'archive, centre de recherches et conservatoire est planifié pour 2015.